Un exemple simple s'impose pour bien comprendre et résumer le principe :
"Vois si un met sage se crée, dit sans les mots"
La première ligne est la phrase officielle, la deuxième le sens officieux, l'entendement selon la langue des oiseaux. La première nous fait part d'un message secret, la deuxième est le message.
Que nous apprend cette façon d'entendre les choses ? Elle nous intime de regarder ("vois"), si une nourriture pour l'esprit ("un mets sage") apparaît ("se crée"), caché derrière le sens premier ("dit sans les mots"). Elle nous incite à aller au delà des apparences du son et de la vision en lettres.
Elle nous apprend également que dans la vision ("vois"), le regard porté sur les choses (et notamment sur lettres), se cache une création ("se crée") silencieuse ("dit sans les mots"), c'est à dire connue, mais tue.
Le chant des oiseaux, c'est le vol des sons, le changement des sens. Le son, dans ce principe, se révèle alors comme primordial et sa symbolique porte à conséquence.
Ainsi, le son précède l'écriture, il nous faut nommer avant d'écrire, inventer le son des lettres et organiser celles-ci. De même, quand une pensée vient à l'esprit ce sont de sons articulés en phrases dont nous nous servons, et non de lettres assemblées. Autrement dit, le son résonne et, "raisonne", en nous bien avant l'organisation en lettres.
Les sons s'élèvent, alors que pour écrire nous nous penchons, la symbolique met ainsi en opposition une aspiration vers le haut avec une attraction vers le bas.
L'adage "les écrits restent mais les paroles s'envolent", montre aussi, au delà de la faculté pour les paroles d'avoir des ailes, combien impalpable et immatérielle réside ce qui est dans le son.
Primant sur lettres, facteur d'élévation, intouchable, la source qui nous approvisionne en sens (le son) semble vraiment s'opposer à la matière et plus tenir de l'invisible. C'est la première leçon donnée par le son, et son intérêt nous apparaît pleinement, nous qui allons toucher à l'invisible en nous initiant au Tarot de Marseille.